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"Il faut penser à la maison" : Le PDG de Minuty parle de son arrivée chez LVMH

François Matton, PDG de Château Minuty, explique pourquoi la marque provençale a rejoint le géant mondial et comment cette décision préserve son avenir.

Frères Jean-Etienne (à gauche) et François Matton (à droite).

Tout le monde demandait : "Je peux goûter votre petit rosé ?", explique François Matton, PDG du Château Minuty. "Votre petit rosé", répète-t-il. Bien que cela paraisse invraisemblable aujourd'hui, il a passé des décennies à essayer de persuader les importateurs et les distributeurs britanniques que le rosé pouvait être plus qu'un simple divertissement.

La situation est aujourd'hui bien différente. L'année dernière, Moët Hennessy a acquis le producteur provençal pour renforcer son offre de rosé. Bien que cette acquisition ait marqué un tournant pour l'entreprise familiale, fondée en 1936, M. Matton ne s'accommode pas de l'arrivée de Château Minuty au sein du groupe mondial de produits de luxe. En effet, il considère que ce partenariat est motivé par un sentiment de bénéfice mutuel.

La question d'un achat ayant été soulevée à plusieurs reprises au fil des ans, Matton et son frère Jean-Etienne ont eu tout le temps de réfléchir à la proposition. "Ce n'était pas une question d'argent. C'était plutôt une question de calendrier", explique M. Matton. "C'était la prochaine étape pour la marque.

Accès au marché

À ses yeux, l'acquisition permet à la marque de poursuivre sa trajectoire organique. En ayant accès à des canaux de distribution bien établis, Moët Hennessy peut promouvoir le vin plus largement qu'une petite équipe familiale ne pourrait le faire. Alors que de plus en plus de marques provençales rejoignent des groupes internationaux, M. Matton estime qu'un tel partenariat est nécessaire pour poursuivre l'expansion de l'entreprise.

Le Château Minuty produit environ 9 millions de bouteilles par an, comprenant à la fois des vins de propriété et des cuvées élaborées avec des viticulteurs partenaires. Pour Matton, le défi réside dans la visibilité plutôt que dans le volume.

"Je suis satisfait du nombre, mais grâce à ce partenariat, je serai encore plus satisfait de la visibilité", déclare-t-il. Sur le marché britannique, Château Minuty a un partenariat de longue date avec Majestic Wines, en particulier pour sa gamme d'entrée de gamme M de Minuty, et s'est récemment lancé dans Waitrose. Cependant, ses principales aspirations pour le Royaume-Uni se situent dans le secteur de l'horeca.

Dans cette optique, Château Minuty et Moët Hennessy ciblent les établissements haut de gamme avec les vins de prestige et les vins de propriété de la maison. Ce n'est pas par hasard que M. Matton a fait part de ses réflexions à l'hôtel cinq étoiles Rosewood de Londres. Sa terrasse a été rebaptisée "Villa Minuty" pour l'été, et les vins de la maison y sont servis avec un menu d'inspiration provençale. Le meilleur vin blanc de Château Minuty, Blanc et Or, est une exclusivité du Rosewood cette année.

Villa Minuty au Rosewood London.

Dans un avenir proche, le Château Minuty donnera la priorité à sa gamme Prestige, élaborée avec des vignerons partenaires mais vendangée et vinifiée par l'équipe de la maison. Proposés en rosé, en blanc et en rouge, leur distribution sera essentielle pour accroître la visibilité de la marque en 2025.

Se tourner vers l'avenir

En ce qui concerne les perspectives à long terme, M. Matton voit à la fois des opportunités et des défis pour le Château Minuty. Le partenariat mis en place il y a un an a permis de relever ces deux défis.

"Quel est l'avenir du Minuty ? Le vin blanc", explique-t-il. Bien que le rosé représente 85 % de sa production, il pense que les vins blancs contribueront à promouvoir les références de qualité de Château Minuty. De plus, il voit un potentiel commercial inexploité pour les vins blancs provençaux. Avec 20 % de sauvignon blanc dans l'assemblage, il pense que le Blanc et Or "pourrait être un grand concurrent du Pouilly-Fuissé".

Une autre opportunité réside dans le développement durable, les vins respectueux de l'environnement étant de plus en plus recherchés par les consommateurs. Les vignobles du domaine sont certifiés "haute valeur environnementale" et le Château Minuty encourage ses viticulteurs partenaires à faire de même. Comme l'explique M. Matton, le producteur a évité l'utilisation d'herbicides et de pesticides depuis l'époque de son grand-père. Bien que la propriété ne se convertisse pas à la viticulture biologique - il cite la forte sensibilité du grenache au mildiou comme le principal obstacle -, elle exploite 15 hectares en agriculture biologique afin de développer l'expertise de son équipe.

Sans surprise, lorsqu'il pense aux défis à venir, le changement climatique figure en bonne place sur la liste de M. Matton. Il décrit l'ADN de la marque comme étant "la fraîcheur, la légèreté et l'élégance", ce qui se reflète dans son désir de produire des vins à l'acidité vive et à la teneur en alcool comprise entre 12,5 et 13 %. Dans les années plus chaudes, cet objectif est plus difficile à atteindre. Il doit être franc lorsqu'il parle de ce défi : "Je ne sais pas ce que sera l'avenir avec le climat".

À l'époque de son père, les viticulteurs vendangeaient à la mi-septembre pour obtenir des taux d'alcool suffisants. Il existait même un programme clandestin de chapatisation dans la région : des camions de sucre arrivaient avant l'aube et les viticulteurs les payaient en liquide. Aujourd'hui, les vendanges commencent à la mi-août et une acidification est parfois nécessaire.

Le parc du château (crédit photo : Hervé Fabre)

Pour Matton, les solutions se trouvent dans l'investissement. C'est une raison supplémentaire d'accepter l'acquisition de Moët Hennessy. Plutôt que de transmettre un héritage difficile par le biais de la famille, le partenariat apporte une nouvelle résilience à l'entreprise. En bref, explique-t-il, "si ce n'est pas moi, ils trouveront quelqu'un d'autre" : "si ce n'est pas moi, ils trouveront un moyen".

Selon M. Matton, l'infrastructure et la réglementation seront essentielles pour relever le défi. La gestion de l'eau, par exemple, est son principal outil pour préserver l'acidité. L'accès aux fonds et l'influence peuvent l'aider à effectuer les ajustements nécessaires. Après tout, explique-t-il, Bernard Arnault, président de LVMH, a assisté à un dîner d'État pour le président Biden et organisé par le président Macron samedi. Les frères Matton, eux, n'y sont pas allés.

Surtout, alors qu'il considère les premières étapes du partenariat et l'avenir qu'il présente, le thème récurrent de Matton est la sauvegarde. Bien que la famille n'ait pas eu à modifier son mode de vinification - "Nous avons le dernier mot", confirme-t-il - il est clair que l'acquisition par Moët Hennessy offre de nouvelles solutions aux défis modernes.

Loin d'une course à l'argent, l'impression générale est celle d'une évolution nécessaire. Bien que Matton n'aille nulle part, l'acquisition a l'air d'une planification de l'héritage. À l'approche des 100 ans de production, tout château serait plus grand qu'un seul individu. "Il faut penser à la maison, dit Matton, et pas seulement à soi.

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