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St Julien 2023 : des rendements élevés et des vins "excellents

Le correspondant de db à Bordeaux, Colin Hay, examine en profondeur le St-Julien, dans le cadre de son analyse appellation par appellation des primeurs 2023, et trouve que ses vins sont excellents et remarquablement homogènes, ainsi qu'à haut rendement. 

En remontant la Gironde vers le nord, et alors que les vignobles de Margaux ont disparu depuis longtemps du rétroviseur, nous arrivons finalement à Saint-Julien, la plus petite des principales appellations du Médoc (avec seulement 910 hectares de vignes). C'est aussi, en moyenne, la plus proche de la rivière. Ce n'est pas sans rapport avec cela qu'elle se targue d'avoir la plus grande proportion de crus classés parmi ses vignobles (avec plus de 90 % des plantations de l'appellation actuellement classées).

Cette singularité explique en partie les chiffres des tableaux suivants et, plus significativement, le succès de l'appellation dans un millésime comme 2023.

La première chose que l'on remarque à propos des données météorologiques résumées dans le tableau 1, c'est qu'elles sont remarquablement - et même suspicieusement - similaires à celles de Pauillac. Intrigue peut-être ? Pas vraiment. L'explication est simple, l'idée d'un subterfuge rapidement écartée. St-Julien est si petit qu'il partage une station météorologique avec Pauillac.

Cela signifie probablement que nous devons prendre ces données avec une petite dose de sel. Mais elles sont suffisamment proches, je pense, de la distribution des précipitations au cours de la saison de croissance pour que l'on puisse constater que, au moins en termes globaux, St-Julien a connu une année quelque peu exceptionnelle. Les précipitations totales ont été légèrement supérieures à la moyenne décennale. En fait, au cours de la période de végétation elle-même, seuls deux mois ont connu des précipitations supérieures à la moyenne, à savoir juin et septembre.

Pourtant, si les précipitations de septembre ont été utiles, en perturbant les conditions caniculaires de la seconde moitié du mois d'août et en aidant à réanimer les vignes avant la phase finale d'une longue récolte, celles de juin ont été responsables d'une pression intense du mildiou.

Pre-budburst

(novembre-mars)

Du débourrement à la récolte

(avril à mi-octobre)

Total

(1/11-15/10)

St-Julien 458 (-5.8%) 441.3 (+13.2%) 899.2 (+1.2%)
Margaux 398 (-19.3%) 464.6 (+11.0%) 862.6 (-5.7%)
Pauillac 458 (-5.8%) 441.3 (+13.2%) 899.2 (+1.2%)
St-Estèphe 550.7 (+3.0%) 411.8 (+4.7%) 912.5 (+1.5%)
Pessac-Léognan 426 (-12.4%) 469.4 (+14.5%) 895.2 (0%)
St-Emilion 306 (-37.1%) 490.8 (+18.1%) 796.8 (-11.8%)
Pomerol 338 (-31.5%) 470.0 (+14.5%) 808.1 (-10.9%)

Tableau 1: Pluviométrie au cours du millésime (par rapport à la moyenne décennale)

Source: calculée à partir du rapport des Saturnalia sur les vendanges de Bordeaux 2023.

Ce St-Julien a négocié peut-être avec plus de succès que n'importe quelle autre appellation de premier plan. C'est ce qui explique les rendements élevés du tableau 2.

2019 2020 2021 2022 2023 Moyenne sur 10 ans Par rapport à la moyenne décennale (% de variation)
St Julien 45.5 34.3 35.2 34.3 50.3 40.1 +25.4
Margaux 49.2 36.3 38.6 31.3 37.7 39.7 -5.0
Pauillac 46.7 37.4 35.1 34.8 47.1 39.7 +18.6
St Estèphe 49.7 41.2 40.7 31.5 51.6 43.4 +18.9
Pessac-Léognan rouge 47.2 34.6 30.7 35.7 38.1 38.5 -1.0
St Emilion (GC) 43.0 36.7 27.5 41.2 40.5 37.2 +8.9
Pomerol 43.0 39.8 28.9 32.3 45.2 36.1 +25.2

Tableau 2 : Rendement moyen du vignoble par appellation (hl/ha)

Source: calcul à partir des données Duanes compilées par le CIVB Service Economie et Etudes

En effet, bien que St-Julien ait été devancé par St-Estèphe pour les rendements absolus les plus élevés, il a obtenu les rendements d'appellation les plus élevés de toute la région par rapport à la moyenne décennale (du moins pour les vins rouges). Il faut remonter à deux décennies pour trouver le dernier millésime où les rendements à St-Julien ont été supérieurs à 50 hl/ha.

Ce résultat est d'autant plus remarquable qu'il a été obtenu dans un millésime caractérisé par une pression importante du mildiou. Un certain nombre de facteurs entrent en ligne de compte. Il s'agit notamment de la proximité du fleuve (les précipitations et les températures diurnes moyennes qui ont accentué la menace du mildiou étant généralement un peu plus élevées à l'intérieur des terres), du nombre relativement faible de propriétés (en tout cas par rapport à Margaux, par exemple) pratiquant la viticulture biologique, de l'accès général plus important aux ressources permettant de traiter le mildiou dans une appellation dont plus de 90 % de la superficie est classée, et du caractère quelque peu plus venteux des vignobles qui bordent généralement le fleuve ou sont situés sur le plateau qui descend jusqu'au fleuve.

Ainsi, à St-Julien, bien que le mildiou ait constitué une pression importante, il a été si bien géré qu'il n'a tout simplement pas été pris en compte dans l'évaluation de la qualité des vins produits.

Ainsi, aussi étrange que cela puisse paraître dans le contexte d'un millésime dont le maître mot est l'hétérogénéité, les vins de St-Julien se révèlent à la fois excellents et remarquablement homogènes.

Rivalisant avec les premiers crus en termes de qualité, les vins de Gruaud Larose et de Léoville Las Cases forment un duo stupéfiant. Ils sont assez différents dans leur style, mais tout aussi séduisants et totalement captivants, exprimant si précisément et si gracieusement leurs terroirs exceptionnels.

Ducru-Beaucaillou, lui aussi, est dans une forme sublime dans ce millésime, façonnant un vin d'opulence, de gravité et de grandeur dans un millésime où chacun de ces éléments est vraiment rare.

Les deux autres vins qui méritent une mention spéciale sont le Léoville-Poyferré, pour son milieu de bouche sinueux, élancé, svelte et soyeux et ses magnifiques arômes, et le Branaire-Ducru , qui semble s'améliorer sans cesse et dont l'ascension vers le sommet se poursuit malgré les difficultés du millésime.

En fait, tous les crus classés de l'appellation ont excellé, comme en témoignent mes notes de dégustation détaillées ci-dessous. Beychevelle et Léoville Barton, surtout, méritent une place dans toute cave bien garnie et le Clos du Marquis et, surtout, le Sarget de Gruaud Larose sont susceptibles de représenter une valeur vraiment fabuleuse.

Faits marquants en 2023

Vins de l'appellation :

  • Gruaud Larose (96-98)
  • Léoville Las Cases (96-98)

C'est vraiment formidable :

  • Ducru Beaucaillou (95-97+)
  • Beychevelle (94-96)
  • Léoville-Barton (94-96)
  • Léoville-Poyferré (94-96)
  • Branaire Ducru (93-95)
  • Clos du Marquis (93-95)

Le choix de la valeur :

  • Branaire Ducru (93-95)
  • Clos du Marquis (93-95)
  • Sarget de Gruaud Larose (92-94)

 

Voir ici les notes de dégustation complètes de Colin sur le Saint-Julien et son analyse des appellations Margaux et Pauillac.

En savoir plus :

Bordeaux 2023 en dix questions

Rapport sur le millésime 2023 de Bordeaux, partie I : qualité et quantité réunies, pour une fois

Rapport sur le millésime de Bordeaux partie 2 : un millésime de réactivité, de vigilance et de surveillance

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